Tirez-moi les cartes
J'aimerais partir, mais venant tout juste d'arriver, je me dis que le serpent pourrait toujours rôder aux alentours. J'entends encore pas mal de remue-ménage dehors... Je n'aime pas trop les diseuses de bonne aventure, mais bon, comme c'est gratuit, je n'ai rien à perdre.
- Okay, allez-y... mais que ça ne prenne pas une heure, hein ?
Son visage s'illumine, balayant d'un trait l'air grave et désagréable qu'il exprimait juste avant. Ravie, elle choisit une pile de cartes, certainement des oracles, la coupe, l'observe en grimaçant puis la mélange. Ensuite, elle l'étale en arc de cercle devant moi, avant de me demander d'en choisir une. Ce que je fais sans prendre le temps de réfléchir tant j'ai hâte d'en finir.
Une fois retournée, elle se penche comme si elle se retrouvait victime de myopie.
- Ah, je comprends mieux. Louis n'est ce pas ?
- Co... comment le savez-vous ?
- Les cartes, jeune homme. Les cartes me disent tout.
- Euh... mouais d'accord. Que vous racontent-elles d'autres ?
Elle me fait signe de retourner une autre carte. Cette fois, je réfléchis une seconde... Je choisis la carte tout au bout de la file. La toute dernière.
- Hum... vous êtes un jeune homme très original, très persévérant. Vous ne lâchez rien. Vous allez jusqu'au bout. (Son ton fut particulièrement grinçant sur la dernière phrase). Non, vous ne lâcherez vraiment rien. Rien de rien. Alors, que voulez-vous savoir ?
Sa voix, tout comme son regard, a perdu de sa chaleur. Je rencontre de nouveau cette femme au visage grave de tout à l'heure.
- Le serpent, pourquoi m'a-t-il attaqué ?
- Posez-moi plutôt une question sur votre avenir, vos études, l'amour ?
Voilà typiquement ce que je n'aime pas chez les charlatans. Ils cherchent à vous influencer sur les questions ; à partir du moment où vous leur cédez un peu de contrôle, ils perdent à mes yeux toutes crédibilités.
- Bon, vais-je réussir mes partiels ? fais-je mine de m'intéresser pour en finir.
Elle confirme.
- Et mes parents, vont-il se remettre ensemble ?
- Vu le plan ingénieux que avez élaboré pour, cela ne fait aucun doute.
Je la contemple, bouche-bée. Je suis impressionné, comment elle sait tout ça ! Ce plan, il n'existe encore que dans ma tête. Même si je devenais parano en imaginant que cette femme m'ait espionné, personne n'aurait pu deviner. Qui est-elle, exactement ? Je trouve tout ça très louche. D'ailleurs, je commence à trouver cette matinée de plus en plus louche !
- Vous en tirez une tête ! Laissez-moi vous servir un verre d'eau.
3
Je n'ai aucune confiance en elle, et c'en est trop !
Je refuse le verre et prends finalement congé.
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